Page 28 - Histoire d'ANNIBAL par Cdt Eugène HALLIBERT 1870 - DZWEBDATA
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               Ce règne de paix et de grandeur1 fut suivi d'une longue période de troubles, et,
               emportée  par  la  tourmente,  la  dynastie  de  Hiram  fut  violemment  arrachée  du
               trône de Tyr2.

               A'bd-Astart, son petit-fils, périt, en 931, victime d'une conspiration qui semble
               n'avoir  été  qu'une  explosion  violente  des  haines  populaires  longtemps
               comprimées.

               L'organisation sociale de la cité tyrienne était loin d'être parfaite, et de nombreux
               abus  arrêtaient  souvent,  dans  la  machine  gouvernementale,  ces  rouages
               essentiels  qui  ne  doivent  jamais  cesser  de  fonctionner.  Sans  doute  le
               gouvernement  royal,  soutenu  dans  ses  écarts  par  une  avide  aristocratie,
               pressurait outre mesure les classes ouvrières de Tyr, dont les travaux de Hiram
               avaient  révélé  l'importance.  Les  masses  sentirent  leur  force,  et  la  révolution,
               dominée, comme il arrive toujours, par des passions ardentes, posa sur la tête
               d'un esclave la couronne tombée du front d'A'bd-Astart.

               L'esclave3  régna  douze  ans  (930-918),  durant  lesquels  un  grand  nombre  de
               patriciens émigrèrent, soit pour aller s'établir aux colonies, soit pour créer des
               colonies nouvelles.

               Ce temps écoulé, les émigrés rentrèrent à Tyr, amenant à leur suite une coalition
               formée  pour  organiser  une  restauration  de  la  dynastie  de  Hiram.  Mais  cette
               famille était usée. Trois frères d'A'bd-Astart remontèrent un instant sur le trône,
               et le dernier en fut précipité par un prêtre d'Astarté, qui prit sa place.

               Cette fois c'était une révolution de palais, qui n'amenait qu'un changement de
               dynastie. Le prêtre Aït-Baal4, souillé du sang du dernier rejeton de Hiram, fut le
               fondateur de cette dynastie nouvelle, et l'autorité monarchique, exercée avec une
               énergie remarquable, rendit à Tyr sa splendeur première.

               C'est sous le règne de cet Aït-Baal que tout le littoral de l'Afrique septentrionale
               se  couvrit  de  colonies  tyriennes,  lesquelles,  dévorées  d'une  activité  fiévreuse,
               allaient  fouiller  au  loin  l'intérieur  du  pays,  et  chercher  jusqu'au  Soudan  des
               débouchés au commerce de la métropole5 Ces créations lointaines offraient de
               grands avantages à la politique du gouvernement, car, d'une part, elles ouvraient
               des voies nouvelles aux instincts d'expansion de l'île de Tyr, et, d'autre




               1 Ce sont vraisemblablement les splendeurs du règne de Hiram qui arrachent
               aux prophètes des cris d'admiration : Isaïe, XXIII, 3 et 8. Ézéchiel, XXVI, 4 et
               12 ; 17 ; XXVII, 3, 4 et 33 ; XXVIII, 7. Cf. XXVI, XXVII, XVIII. Amos, I, 10.
               Zacharie, IX, 3.

               2 Josèphe et Eusèbe nous ont laisse une liste des rois de Tyr, de Hiram jusqu'à

               Pygmalion. Ceux de la dynastie de Hiram Ier sont :
               Baleastartus (946-940), fils de Hiram ; alias Baal-Astart ;

               Abdastartus (939-931), mort victime d'une conspiration ; alias A'bd-
               Astart ; Astartus (918-907) ;
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