Page 136 - Les histoires de DJEHA - Oeuvre libre de droit
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- Non, une scie. J'aimerais enlever le haut de mon bol,
qui ne me sert à rien.
Djeha était à sa fenêtre quand il vit un enterrement
descendant sa rue. Les proches du défunt pleuraient.
- Cher disparu ! Tu vas aller rejoindre un endroit où il
n'y a ni lumière, ni feu, ni nourriture, ni eau. Quelle
tristesse !
Djeha se tourna vers sa femme et lui dit :
- Vite ! Vite ! Ferme la porte d'entrée. D'après ce qu'ils
disent, ils vont amener le mort chez nous.
Djeha était imam et faisait un sermon sur les femmes
qui se fardent.
- C'est mauvais et scandaleux. C'est impur et indécent !
Mes frères, ne permettez pas à vos femmes de mettre du
kohl sur leurs sourcils et de la poudre de riz sur leurs
joues. C'est honteux !
- Mais Djeha Effendi, objecta l'auditoire, ta propre
femme se farde !
- C’est vrai, c'est vrai dit Djeha en souriant, cela lui va
très bien, n'est-ce pas ?
Djeha étant le seul au village à savoir lire et écrire,
quelqu'un vient lui demander d'écrire une lettre.
- Impossible, dit Djeha, j'ai mal aux pieds.
- Qu'as-tu besoin de tes pieds pour écrire une lettre ?
- Non, mais j'écris tellement mal qu'il me faudrait
porter la lettre chez le destinataire pour la lui lire !