Page 138 - Histoire d'ANNIBAL par Cdt Eugène HALLIBERT 1870 - DZWEBDATA
P. 138

138






               Les Carthaginois évacueront la Sicile et toutes les îles situées entre la Sicile et
               l'Italie. Sûreté est garantie par les deux Républiques contractantes à leurs alliés
               respectifs ; chacune promet de ne prétendre à aucun empire sur les possessions
               de l'autre, de ne bâtir aucun monument public chez les alliés de celle-ci, de n'y
               lever aucune troupe de mercenaires, de ne jamais rechercher leur alliance. Les
               Carthaginois  payeront,  en  dix  ans,  deux  mille  deux  cents  talents,  plus  mille
               comptant (près de six millions de francs)1. Enfin ils rendront aux Romains tous
               leurs prisonniers sans rançon.

               Ainsi, dit Polybe2, se termina la guerre de Carthage et de Rome au sujet de la
               Sicile,  guerre  qui  dura  sans  interruption  vingt  quatre  ans,  et  qui  est,  à  notre
               connaissance, la plus longue, la plus continue, la plus grande dont on ait jamais
               écrit  l'histoire.  Sans  parler  des  combats  et  des  armements  de  médiocre
               importance,  on  vit,  en  comptant  les  deux  flottes,  plus  de  500  quinquérèmes
               figurer  en  une  bataille,  et  plus  de  700  dans  une  autre.  Enfin  les  Romains
               perdirent dans cette lutte 700 navires environ, y compris ceux que détruisit la
               tempête ; les Carthaginois, environ 500.

               On a très-sévèrement jugé le traité des îles Ægates ; on a répété maintes fois qu'il
               avait  consacré  la  honte  du  vaincu.  M. Michelet, surtout, ne  ménage  point  les
               marchands  de  Carthage,  qui  n'étaient  point,  dit-il,  à  bout  de  ressources,  et
               pouvaient  bien  continuer  la  guerre  ;  qui  ne  comprenaient  point  que  leur
               influence politique, une fois compromise, devait entraîner dans sa ruine et leur
               commerce et leur opulence, à laquelle ils sacrifiaient si facilement l'honneur. En
               réalité, le traité des Ægates n'avait rien de honteux pour la République ; il était
               une  nécessité.  Ce  qu'on  doit  blâmer,  ce  sont  les  fautes  du  gouvernement
               carthaginois,  qui  négligea  maladroitement  l'entretien  de  ses  forces  militaires
               navales, et ne sut pas venir, en temps opportun, au secours du grand Amilcar.
   133   134   135   136   137   138   139   140   141   142   143