Page 46 - Histoire d'ANNIBAL par Cdt Eugène HALLIBERT 1870 - DZWEBDATA
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de la protéger, une marine marchande est frappée d'impuissance, et nous
estimons qu'ils ont ouvert leurs deux bassins d'un seul coup. Quoi qu'il en soit,
nous connaissons aujourd'hui, grâce aux travaux de M. Beulé, les proportions de
ces constructions hydrauliques1.
Au point de raccordement de la Tænia avec la presqu'île, se dessinait une petite
rade, formée, d'une part, par la Tænia elle-même, et, de l'autre, par un môle en
maçonnerie assis sur d'énormes enrochements. C'était l'entrée du port marchand.
Dès qu'ils avaient accosté le revers du môle, les navires qui voulaient mouiller
au port pénétraient par un goulet de 5m,65 de largeur, le long duquel ils se
faisaient haler ; quant au port lui-même, de forme à peu près rectangulaire, il
présentait une superficie totale de 139.550 mètres carrés, et nous devons
exprimer ici le regret d'être en désaccord avec M. Beulé, qui, par suite d'une
erreur de calcul toute matérielle2, a écrit le nombre 148.200.
Le port marchand était mis en communication avec le port militaire par un
goulet intérieur de 23 mètres de large sur 20 de long.
Le port militaire affectait exactement la forme d'un cercle de 325 mètres de
diamètre ; au centre de ce cercle émergeait une île de 53 mètres de rayon.
Un chapitre ultérieurement consacré au tableau de Carthage parvenue à l'apogée
de sa puissance exposera en détail l'organisation intérieure et le système
décoratif de ces bassins, si bien conçus dans leurs dispositions d'ensemble. Il
convient seulement de constater ici l'importance des travaux exécutés par les
fondateurs. Quelques chiffres feront juger des proportions de leurs ouvrages.
Le port marchand présentait une superficie de 13h 95a 50c.
Le goulet intérieur 4a 60c.
Le port militaire 8h 29a 57c.
Ensemble 22h 29a 67c.
Le vieux port de Marseille, de 900 mètres de long sur 300 de large, soit 27
hectares de superficie, n'a par conséquent que 4 hectares 70 ares 33 centiares de
plus que les deux ports de Carthage pris ensemble. Certes, si l'on tient compte de
l'imperfection des moyens d'exécution dont l'antiquité pouvait disposer, et qu'on
remarque encore une fois que ces docks étaient creusés de main d'homme, on
conviendra sans peine que de telles créations peuvent soutenir la comparaison
avec nos constructions modernes les plus hardies. Les chiffres que nous venons
de poser ont leur éloquence, et l'on peut admirer sans
1 Belidor (Architecture hydraulique) donne des ports de Carthage un plan qui
ne semble pas être le fruit d'une étude sérieuse.
2 Il s'agit d'une omission insignifiante en soi, mais dont le résultat fait tache dans
le mémoire du savant archéologue. Les documents scientifiques que contient ce