Page 42 - Histoire d'ANNIBAL par Cdt Eugène HALLIBERT 1870 - DZWEBDATA
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               La Byrsa fut fortifiée dès sa fondation1 ; mais ces murailles primitives ont dû
               être  ultérieurement  démolies,  et  remplacées  par  les  défenses  grandioses  dont
               Appien nous a laissé la description. Cette transformation eut vraisemblablement
               lieu dans le cours du vie siècle avant Jésus-Christ, époque de la splendeur de
               Carthage.  Qu'étaient  les  fortifications  créées  par  Elissa  ?  Il  est  difficile  d'en
               esquisser la forme ; mais on peut facilement se représenter une enceinte dont le
               tracé  décrivait  le  pourtour  du  plateau.  Le  plateau  lui-même,  dont  les  talus
               formaient  glacis,  n'était  pas  apparent  lors  de  l'arrivée  d'Elissa.  Les  colons
               s'étaient heurtés en ce point à un mamelon boisé2, presque impénétrable et d'une
               occupation  difficile  ;  mais,  s'étant  aussitôt  mis  à  l'œuvre,  ils  avaient
               débroussaillé les lieux, dérasé, nivelé le sol, déblayé une épaisse couche de terre
               végétale,  et  mis  enfin  à  découvert  une  roche  argileuse,  de  teinte  jaunâtre.  Ce
               grès, très-consistant et facile à tailler, servit de base à leurs établissements.

               C'est ainsi qu'ils conquirent l'assiette d'une acropole heureusement située, et de
               dimensions  telles  que,  à  la  fin  du  siège  de  l'an  146  avant  Jésus-Christ,  cette
               citadelle  put  donner  asile  à  50.900  personnes.  Elle  contenait  sans  doute  des
               magasins, des citernes, des logements ; mais on ne peut former, à cet égard, que
               de simples conjectures.

               Quant aux temples, aucun document historique n'autorise à placer dans Byrsa
               celui de  Melkarth, l'archégète  de  toutes  les  colonies  tyriennes. On  sait  que  le
               temple  d'Astarté3  était  sur une  autre  colline. Peut-être  faut-il d'ailleurs laisser
               dans le monde des fictions celui de Sichée4, et cet autre monument qu'Annibal
               fait vœu d'élever à Anna5.

               Le temple de Didon6 apparaît dans Byrsa avec plus de certitude. Il devait être
               adjacent au palais de la reine, bâti sur le point culminant, car on sait que des
               terrasses  de  ce  palais  on  découvrait  toute  la  plaine,  ainsi  que  la  rade  de

               Carthage7. M. Beulé croit en avoir retrouvé les ruines au sud-ouest de l'église
               Saint-Louis.

               Il  est  certain  que  le  temple  d'Aschmoun,  dont  parle  Appien,  fut  élevé  dans
               Byrsa, sur le bord du plateau regardant le rivage, et tout porte à croire que cet
               édifice, partie intégrante de la fortification, remonte au temps même d'Elissa. La
               fondatrice a sans doute voulu mettre sous la protection du dieu que les Romains
               assimilent à Esculape une colline naturellement salubre et environnée de toutes
               les  splendeurs  de  la  création.  Le  temple  d'Aschmoun  occupait  l'emplacement
               même  de  l'église  dédiée  au  saint  roi.  Enfin,  au  sud  de  cette  église,  M.  Beulé
               indique le point où s'élevait, ainsi qu'il le suppose, le temple de Jupiter, et l'on
               peut en attribuer aussi la création à la reine Elissa.

               Tels  sont,  dans  l'état  actuel  de  la  science,  les  seuls  documents  que  nous
               possédions sur la Byrsa de Didon et sur ses édifices. Quelques détails divers sont
               d'ailleurs parvenus jusqu'à nous.
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