Page 40 - Histoire d'ANNIBAL par Cdt Eugène HALLIBERT 1870 - DZWEBDATA
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               ports des objets d'art que les Vandales avaient autrefois pris à l'Italie, pour les
               porter à Carthage.

               Enfin  l'Europe  s'émut.  Carthage  n'était  donc  pas  morte  tout  entière  pour  la
               science  : on pouvait  encore soulever  quelques  voiles, sauver quelques débris,
               ressusciter peut-être un cadavre géant !

               L'Anglais  Shaw,  le  premier,  visite  ces  ruines  (1738),  mais  il  méconnaît
               complètement la topographie de la ville, qu'il place dans le voisinage d'Utique. Il
               lui fait regarder l'occident, s'exprime vaguement sur Byrsa, et suppose les ports
               comblés par les sables de l'oued Medjerda. Le géographe d'Anville et l'ingénieur
               Belidor admettent sans vérification le système de Shaw.

               En 1805, le père Caroni donne assez exactement le plan des ports et de la Byrsa.

               Toutefois il prête à celle-ci une enceinte trop considérable et de forme circulaire.

               Puis viennent les études du comte Camille Borgia sur les ports, celles du major
               Humbert, celles de Chateaubriand, qui ne fait que suivre les idées de Humbert.
               Estrup  (1821)  et  Ritter  (1822)  reproduisent  l'erreur  de  Shaw,  et,  à  leur  suite,
               Heeren et Mannert font de Carthage une description erronée et confuse. Enfin
               paraît  l'excellent  plan  de  Falbe  (1833).  Byrsa  est  mise  à  la  place  qu'elle  doit
               occuper,  et  l'architecte  Dedreux,  se  conformant  de  tous  points  aux  idées  de
               Falbe, publie, en 1839, une carte satisfaisante.

               Mais bientôt de nouvelles erreurs se font jour. M. Dureau de la Malle, qui, de
               son cabinet, étudie la topographie d'une ville éteinte, forge un système nouveau,
               que ne sait point réfuter la Société fondée à Paris (1838) pour l'exploration de
               Carthage.  Sir  Thomas  Read,  qui  visite  les  lieux,  l'architecte  Jourdain,  qui
               construit  la  chapelle  Saint-Louis,  laissent  passer  inaperçue  l'exagération  des
               dimensions prêtées à la Byrsa. M. de la Malle, en effet, n'admet pas que la Byrsa
               n'ait  été  qu'une  acropole  ;  il  lui  donne  une  étendue  considérable,  la  compose
               d'une  série  de  vallons,  de  collines  et  de  plaines,  et  y  enferme  une  multitude
               d'édifices dont les données historiques n'autorisent pas la mention.

               Ces erreurs systématiques, fruit d'une imagination féconde, devaient encourager
               les hypothèses les plus étranges. Le pasteur Nathan Davis, enchérissant sur M.
               de la Malle, expose que la Byrsa comprend toutes les collines qui se succèdent
               depuis  Saint-Louis  jusqu'à  Bordj  Djedid.  Sir  Grenville  Temple  avait  depuis
               longtemps combattu cette opinion, que son compatriote Blakesley adopte sans
               contrôle, à la suite de M. Davis.

               En somme, il est sage de s'arrêter dans cette voie déjà bien découverte et mise à
               nu. Le major Humbert, Chateaubriand et Falbe semblent seuls dans le vrai. La
               colline de Saint-Louis est bien l'antique Byrsa et Byrsa tout entière.

               Leur opinion se corrobore de celle du docteur Barth, et surtout des conclusions
               irréfutables de M. Beulé, qui a fait, en 1850, des fouilles importantes à Carthage.
               Jamais, dit M. Beulé, jamais les anciens n'ont établi une acropole au bord de la
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