Page 66 - Histoire d'ANNIBAL par Cdt Eugène HALLIBERT 1870 - DZWEBDATA
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des villes1, qu'habitaient des nations soumises aux lois d'une organisation
politique avancée, et constituées en Etats monarchiques2.
Quelles étaient ces populations africaines avec lesquelles les Carthaginois se
trouvaient en contact ? Une courte discussion ethnologique n'est point ici hors
de propos.
On sait que l'espèce humaine se partage en plusieurs grands rameaux. Le plus
intéressant de tous, celui qui semble le prototype de l'espèce, est sans contredit le
rameau caucasique ou la race blanche. Celle-ci se sous-divise, à son tour, en
trois branches distinctes, constituant les familles Japhétique (ou indo-
européenne), Sémitique et Chamitique. Une grande supériorité morale semble
avoir acquis au sang indo-européen le droit et l'honneur de représenter
l'humanité perfectible.
On peut, sans courir grande chance d'erreur, admettre que les Libyens se
rattachent aux Phéniciens par les liens d'une étroite parenté. Ce sont, en effet,
des descendants de Laabim, petit-fils de Cham3, qui, à l'aurore des temps
historiques, se répandent sur le sol africain, pendant que leurs germains, fils de
Chanaan, fils de Cham, couvrent les rivages de la Syrie.
Les races humaines paraissent assujetties à des lois de mélanges dont le principe
et l'organisme échappent le plus souvent à l'analyse, mais qui n'en ont pas moins
une réalité incontestable. En particulier, la race blanche a procédé plus d'une
fois, durant le cours des siècles, à la fusion de ses trois éléments constitutifs, et
l'étude de l'Afrique est surtout intéressante en ce qu'elle est toujours la scène des
événements qui amènent d'intimes croisements entre les enfants de Cham, de
Sem et de Japhet.
Les Chamites de Libye, considérés comme autochtones, ont donc souvent ouvert
leurs veines au sang sémitique d'Arabie, de Syrie ou d'Asie Mineure ; mais ils y
ont surtout laissé couler à flots le sang indo-européen ; enfin des courants
chamiliques, marchant d'orient en occident, sont venus, par intervalles, rafraîchir
la sève des Libyens primitifs.
Les traditions les plus anciennes mentionnent les invasions chananéennes,
conséquence immédiate des conquêtes de Josué (vers 1450 avant Jésus-Christ),
puis celle des Arabes sabéens, des Amalécites, des habitants de la Palestine. Les
Senhadja, les Kelama, les Lamta, les Haouara, les Masmouda, les Laouta,
devraient être considérés comme la descendance des Sabéens du Yémen ; les
Zenata seraient de la famille des Amalécites ; les Djaloulia, de celle des
Philistins. Il convient d'observer, enfin, qu'on trouve au Maroc des Juifs dont
l'établissement en Afrique paraît être de beaucoup antérieur à l'ère chrétienne.
Ces populations diverses, mélangées aux Libyens dits autochtones, auraient,
suivant les historiens arabes, formé la souche des Gétules (Eg-Toula, les enfants
du pays).
Comme les conquêtes de Josué, les exploits de l'Hercule tyrien modifièrent
profondément les conditions ethnographiques de l'Afrique septentrionale.