Page 206 - L'ane d'Or - auteur : APULEE- Libre de droit
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esprit, dans la mesure de ma faveur plutôt que suivant les exigences
des règles. Mais, grâce au ciel, je n’eus regret à mes peines ni à mes
dépenses ; car je vis grossir mes honoraires, et ma profession d’avocat
devenir honnêtement lucrative. À quelques jours de là, le dieu
suprême entre les dieux, grand entre les grands, auguste entre les
augustes, le souverain dominateur Osiris, daigna m’apparaître dans
mon sommeil, non plus sous une forme empruntée, mais dans tout
l’éclat de la majesté divine. Il m’engagea à persévérer intrépidement
dans la glorieuse carrière du barreau, en dépit de ce que pourrait
répandre contre moi la malveillance, irritée d’un succès acheté par tant
de veilles. De plus, et pour ne pas me laisser confondre, dans la
pratique de son culte, avec le vulgaire de ses adorateurs, il m’admit
dans le collège des Pastophores, et même au nombre des décurions
quinquennaux. Dès ce moment, je me fis raser les cheveux, et me
dévouai sans réserve aux devoirs qu’impose à ses membres cette
corporation d’antique origine, et contemporaine de Sylla ; au lieu de
rougir de mon chef dégarni, je me promène avec orgueil nu-tête, et
j’en fais montre à tout venant.
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