Page 102 - Histoire d'ANNIBAL par Cdt Eugène HALLIBERT 1870 - DZWEBDATA
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obtient d'incroyables succès. Il prend Megalopolis, Neapolis, Adrumète,
Thapsus, Utique, Hippo-Diarrhyte, en tout plus de deux cents villes. Il gagne à
sa cause les alliés et les sujets de Carthage, culbute les armées d'Hannon et de
Bomilcar, et vient camper sous Tunis. Carthage court les plus sérieux dangers.
Durant quatre ans, Agathocle et ses deux fils, Héraclite et Archagathe,
parcourent en tous sens et ravagent le territoire carthaginois, et, pendant ce
temps, Antandros, frère d'Agathocle, commande la place de Syracuse, devant
laquelle il tient en respect les assiégeants.
L'empire carthaginois, sur le point de périr, ne dut alors son salut qu'au bon état
de ses finances. Trois grandes armées furent levées simultanément, pour opérer
sur le littoral, à l'intérieur et dans le sud. Dès lors, les forces des Siciliens se
divisèrent, Carthage fut débloquée, et les Africains, frappés du spectacle
imposant de tant de corps de troupes tenant à la fois la campagne, se prirent à
regretter d'avoir embrassé le parti d'Agathocle.
L'aventurier grec se sentit perdu. Il abandonna son armée, s'enfuit à Syracuse, et
son étonnante expédition eut pour dénouement le supplice de ses deux fils (306).
L'année suivante, un traité, intervenu entre Agathocle et les Carthaginois, rétablit
les possessions des deux parties belligérantes en l'état où elles se trouvaient
avant la guerre, et la paix se continua jusqu'à la mort d'Agathocle, qui arriva en
289.
Quelle avait été l'attitude de Rome pendant cette guerre d'Agathocle, qui avait
mis Carthage à deux doigts de sa perte ? On ne saurait la préciser. Un traité, qui
malheureusement ne nous est point parvenu, était conclu entre les deux
Républiques, au moment même (306) où la guerre d'Afrique allait finir1. Mais
quelles pouvaient en être les clauses ? Elles étaient sans doute empreintes d'un
grand esprit de conciliation de la part de Carthage. L'affaiblissement de cette
puissance, la nécessité où elle se trouvait alors de contracter des alliances
durables, les articles mêmes du quatrième traité, conclu vingt-neuf ans plus tard,
tout permet de le supposer.
Alexandre le Grand n'était plus, mais l'un de ses successeurs et cousins rêvait à
son tour la conquête de l'Occident : c'était Pyrrhus. Infatigable aventurier,
aimant la guerre pour la guerre, cet intrépide Epirote avait déjà deux fois perdu
et regagné son royaume, envahi et abandonné la Macédoine. Las de guerroyer en
Grèce, il venait de jeter en Italie une petite armée de 25.000 hommes, avec vingt
éléphants (277).
C'est à cette date qu'il faut rapporter le quatrième traité conclu par les deux
Républiques, romaine et carthaginoise. Le dernier traité qu'elles signèrent, dit
Polybe2, remonte à l'époque où Pyrrhus descendit en Italie, quelque temps avant
la guerre de Sicile. Dans cet acte, toutes les clauses antérieures sont respectées.
On y ajoute seulement quelques conditions nouvelles. Si l'une ou l'autre
République (y est-il dit) fait par écrit alliance avec Pyrrhus, elle devra stipuler
que les deux puissances contractantes auront le droit de se prêter mutuellement
secours, en cas d'invasion étrangère. Les Carthaginois fourniront la flotte et les