Page 90 - Les Mile et une nuits - conte orientale libre de droit, par DZWEBDATA.COM
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Ce discours affligea fort le pêcheur :
              « Je suis bien malheureux, s’écria-t-
              il, d’être venu en cet endroit rendre
              un si grand service à un ingrat !
              Considérez, de grâce, votre injustice,
              et révoquez un serment si peu
              raisonnable. Pardonnez-moi, Dieu vous
              pardonnera de même : si vous me donnez
              généreusement la vie, il vous mettra à
              couvert de tous les complots qui se
              formeront contre vos jours.
              - Non, ta mort est certaine, dit le
              génie ; choisis seulement de quelle
              sorte tu veux que je te fasse mourir. »
              Le pêcheur, le voyant dans la
              résolution de le tuer, en eut une
              douleur extrême, non pas tant pour
              l’amour de lui, qu’à cause de ses trois
              enfants dont il plaignait la misère où
              ils allaient être réduits par sa mort.
              Il tâcha encore d’apaiser le génie : «
              Hélas ! reprit-il, daignez avoir pitié
              de moi, en considération de ce que j’ai
              fait pour vous.
              - Je te l’ai déjà dit, repartit le
              génie, c’est justement pour cette
              raison que je suis obligé de t’ôter la
              vie.
              - Cela est étrange répliqua le pêcheur,
              que vous vouliez absolument rendre le
              mal pour le bien. Le proverbe dit, que
              qui fait du bien à celui qui ne le
              mérite pas en est toujours mal payé. Je
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