Page 109 - Histoires et Contes Arabes - Bibliothèque du bon vivant - 1927 - DZWEBDATA
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HISTOIRES ARABES
L'homme aperçut un œil mutin qui le fît se retour-
ner et bien augurer du reste. La femme jugeant
l'homme bien fait et à son goût souleva rapidement
son voile.
Ils se comprirent vite et le galant emmena chez lui
sa conquête.
Mais avant que d'assouvir son désir, il voulut lui
offrir une collation, car les plaisirs de l'amour sont
plus doux quand ils sont précédés de quelques tasses
de thé, de gâteaux et de douceurs chères aux femmes,
ainsi que d'une légère attente qui rend la passion plus
ardente et les joies plus aiguës.
Notre homme sortit donc, laissant la belle au logis,
après avoir donné un tour de clef.
Par malheur il rencontra en Toute un créancier
impitoyable qui le cherchait et le fit conduire à la
prison pour dettes. Qu'allait devenir la femme enfer-
mée chez lui ?
Un ami qu'il rencontra voulut bien piendre sa clef
et se charger d'aller délivrer la belle.
Catastrophe I Cette femme était la sienne et les deux
époux se trouvèrent nez à nez...
Sans se troubler, l'épouse confondue déclara :
— Mon ami, ne vou? mettez point en colère. Cela
ne servirait à rien. Divorçons à l'amiable. Comme les
apparences me donnent tort, je vous fais a'bandon de
ma dot, et consens même à vous laisser nies bijoux,
trop heureuse de conserver ma réputation.
Le mari, philosophe, accepta le marché et tous
deux se rendirent le lendemain au tribunal du cadi.
Le mari déclara au juge qu'il répudiait sa femme,
d'accord avec celle-ci, qui, de bon gré, renonçait à
sa dot.
Mais au lieu d'acquiescer, la rusée s'écria en fei-
gnant de pleurer toutes les larmes de ses yeux :
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