Page 192 - L'ane d'Or - auteur : APULEE- Libre de droit
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suspendus sur le dos des miroirs tournés vers la déesse, afin qu’elle
pût avoir la perspective du train dévot qui la suivait. Quelques-unes,
tenant en main des peignes d’ivoire, simulaient, par les mouvements
du bras et des doigts, des soins donnés à la royale chevelure. D’autres
enfin, secouant des gouttes d’un baume précieux et de mille autres
essences, en arrosaient le sol au loin parfumé. On voyait, en outre, un
concours nombreux de personnes des deux sexes, munies de lanternes,
de torches, de bougies et autres luminaires, par forme d’hommage
symbolique au principe générateur des corps célestes. Venaient ensuite
deux sortes de flûtes formant d’agréables concerts. Puis, deux bandes,
formées de l’élite de la jeunesse, vêtues de blanc, chantaient, en se
répondant l’une à l’autre, un hymne composé, sous l’inspiration des
Muses, par un poète de mérite et dont chaque verset ramenait le début
de l’invocation en forme de refrain. Parmi ces derniers se
distinguaient les musiciens du grand Sérapis, qui, tenant leur flûte dans
la direction de l’oreille droite, exécutaient la musique consacrée du
dieu, et spéciale à son temple.
Après eux marchaient de nombreux officiers, criant à la foule de
faire place au sacré cortège, et suivis de la multitude des initiés aux
sacrés mystères, hommes, femmes, de tout rang, de tout âge, tous en
robes de lin d’une blancheur éblouissante ; les femmes entourant de
voiles transparents leur chevelure inondée d’essences ; les hommes
rasés jusqu’à la racine des cheveux, et montrant à nu leur chef luisant.
Pléiade terrestre de la grande déesse, ces derniers venus tenaient des
sistres d’airain, d’argent et même d’or, dont ils tiraient un tintement
aigu. Venait ensuite le corps imposant des pontifes, vêtus de blanches
robes de lin, serrées à la taille et descendant jusqu’aux talons. Les
divins attributs étaient dans leurs mains. Leur chef tenait une lampe
qui répandait la clarté la plus vive, et dont la forme, qui était celle
d’une nef d’or, n’avait rien de commun avec les lampes de nos repas
du soir ; car le foyer était au centre, et fournissait un bien plus grand
volume de lumière. Le second pontife, vêtu comme le premier, portait
dans ses mains les deux autels appelés secours, d’où dérive l’épithète
de secourable, attachée au nom de la grande déesse. Un troisième
élevait en marchant une palme d’or, dont les feuilles étaient du travail
le plus exquis, et le caducée de Mercure. Un quatrième montrait le
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