Page 20 - L'ane d'Or - auteur : APULEE- Libre de droit
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entendre, chacun croirait qu’il sort de ces gosiers de pierre. L’habile
statuaire a fait ici un véritable tour de force. Les chiens sont en élan,
et toute leur partie antérieure semble porter en l’air, tandis qu’elle
repose en effet sur les pieds de derrière qui n’ont pas quitté le sol. En
arrière de ce groupe s’élève une grotte tapissée de mousse, de gazon,
de lianes grimpantes et de pampre, entremêlés çà et là de ces arbustes
qui se plaisent sur les rochers. Tout l’intérieur de la grotte est éclairé
par le reflet du marbre, dont rien n’égale la blancheur et le poli. Au
dehors et sur les flancs pendent des raisins et d’autres fruits, que l’art,
émule de la nature, a exprimés avec une vérité parfaite. C’est à croire
qu’ils attendent seulement, pour être cueillis et mangés, que la
coloration leur soit venue du souffle mûrissant du vent d’automne.
Penchez-vous, et voyez-les se réfléchir dans le miroir de ces fontaines
qui jaillissent en divers sens des pieds de la statue ; ils tremblent dans
cette onde agitée comme aux rameaux de la vigne elle-même, et à
l’imitation déjà si parfaite se joint le prestige du mouvement. Au
travers du feuillage, on voit se dessiner la figure d’Actéon, déjà cerf à
moitié. Il jette, en tournant la tête, un regard furtif sur la déesse, et
guette l’instant où elle va se mettre au bain.
Tandis que mon œil charmé parcourt à l’envi ces belles choses,
revenant sans cesse de l’une à l’autre : Tout ce que vous voyez est à
vous, me dit Byrrhène ; et désirant m’entretenir en tête-à-tête, elle fit
retirer tout son monde. Quand nous fûmes seuls : Je tremble pour
vous comme pour un fils, mon bien-aimé Lucius, me dit-elle ; j’en
prends Diane à témoin. Ah ! que je voudrais pouvoir écarter les
dangers qui menacent cette tête si chère ! Gardez-vous, mais gardez-
vous sérieusement des fatales pratiques et des détestables séductions
de cette Pamphile, la femme de Milon, que vous dites être votre hôte.
C’est, dit-on, une sorcière du premier ordre, experte au plus haut degré
en fait d’évocations sépulcrales. Elle peut, rien qu’en soufflant sur une
pierre, une baguette ou quelque autre objet aussi insignifiant,
précipiter les astres du haut de la voûte éthérée dans les profondeurs
du Tartare, et replonger la nature dans le vieux chaos. Elle ne voit pas
un jeune homme de bonne mine sans se passionner aussitôt. Dès lors,
ni ses yeux ni son cœur ne peuvent se détacher de lui. Elle l’entoure
d’amorces, s’empare de son esprit, l’enlace à jamais dans les chaînes
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