Page 65 - GUERRE DE JUGHURTA par SALLUSTE - Traduction Ch. Durozoir - 1865 - DZWEBDATA
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projetait, s'il n'avait qu'une poignée d'hommes ou bien une
armée, et quelle était sa contenance depuis sa défaite. Ce
prince s'était retiré dans des lieux couverts de bois et
fortifiés par la nature. Là, il rassemblait une armée plus
nombreuse à la vérité que la première, mais composée
d'hommes lâches, faibles, plus propres à l'agriculture et à la
garde des troupeaux qu'à la guerre. Il en était réduit à cette
extrémité, parce que, chez les Numides, personne, excepté
les cavaliers de sa garde, ne suit le roi après une déroute.
Chacun se retire où il juge à propos et cette désertion n'est
point regardée comme un déshonneur : les moeurs de la
nation l'autorisent. Convaincu que Jugurtha n'a point laissé
fléchir son courage indomptable, et que pour les Romains
va recommencer une guerre où rien ne se fera que selon le
bon plaisir de l'ennemi, où ils ne combattront jamais
qu'avec des chances inégales, où enfin la victoire leur sera
plus désastreuse que la défaite aux Numides, Metellus se
décide à éviter les engagements et les batailles rangées,
pour adopter un nouveau plan d'opérations. Il se dirige
dans les cantons les plus riches de la Numidie, ravage les
champs, prend les châteaux et les places peu fortifiées ou
sans garnison, les livre aux flammes, passe au fil de l'épée
tout ce qui est en état de porter les armes, et abandonne au
soldat le reste de la population. La terreur de ces
exécutions fait qu'on livre aux Romains une foule d'otages,
qu'on leur apporte des blés en abondance, et tout ce dont ils
peuvent avoir besoin. Partout où ils le jugent nécessaire, ils
laissent des garnisons. Cette manoeuvre inspire au roi de
bien plus vives alarmes que l'échec récemment éprouvé par
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