Page 33 - L'ane d'Or - auteur : APULEE- Libre de droit
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amour adultère et l’appât de sa succession ont poussé une épouse à ce
crime. Le vieillard allait de l’un à l’autre, ne cessant de faire entendre
ses plaintes lamentables. Déjà les esprits s’irritent ; le crime paraît
probable ; on y croit. Des pierres ! un bûcher ! s’écrie-t-on de toutes
parts. Et voilà les enfants qu’on excite contre cette malheureuse. Elle,
le visage baigné de pleurs de commande, et simulant de son mieux
l’horreur d’un tel attentat, prenait tous les dieux à témoin de son
innocence.
Eh bien ! dit le vieillard, reposons-nous sur la divine providence du
soin de manifester la vérité. Il y a ici un Égyptien nommé Zatchlas,
prophète du premier ordre. Dès longtemps il s’est engagé avec moi, au
prix d’une somme considérable, à évoquer temporairement une âme
du fond des enfers, et à lui faire animer de nouveau le corps qu’elle
aurait quitté. Il dit, et fait avancer au milieu de l’assemblée un jeune
homme couvert d’une robe de lin, chaussé d’écorce de palmier, le poil
rasé entièrement ; et, après lui avoir longtemps baisé les mains et
même embrassé les genoux, il lui adresse ces paroles : O pontife ! ayez
pitié de nous ; je vous en conjure par les célestes flambeaux, par les
divinités infernales, par tous les éléments de cet univers, et le silence
des nuits, et les mystères de Coptos, et les crues du Nil, et les arcanes
de Memphis, et les sistres de Pharos. Que ces yeux fermés pour
l’éternité puissent un moment se rouvrir au soleil, et ressaisir la
lumière des cieux ! Nous ne voulons pas troubler l’ordre naturel, ni
disputer à la terre ce qui lui appartient. C’est afin que justice soit
rendue au mort, que nous demandons pour lui ce retour d’un moment
à l’existence. Cette allocution eut son effet sur le prophète. Il appliqua
trois fois une certaine herbe sur la bouche du défunt, puis une autre
herbe autant de fois sur sa poitrine. Se tournant alors vers l’orient, il
adresse une prière tacite au soleil, qui s’élevait majestueusement au-
dessus de l’horizon. Ce préliminaire imposant émeut et préoccupe les
spectateurs, et les met dans une grande attente du miracle qui va
s’accomplir.
Je me mêle à la foule, et, montant sur une borne, derrière le lit
funèbre, je regardais de tous mes yeux. Un léger soulèvement se
manifeste vers la poitrine du mort, son pouls recommence à battre, ses
poumons à jouer ; le cadavre se met sur son séant ; la voix du jeune
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