Page 39 - L'ane d'Or - auteur : APULEE- Libre de droit
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que par le cri de ma conscience. Enfin une inspiration d’en haut me
         rendit courage, et je répliquai :   En présence des cadavres de trois
         citoyens, je sens combien est difficile la position de l’homme qui est
         accusé  de  leur  trépas.  Quoiqu’il  dise  la  vérité,  quoiqu’il  fasse
         spontanément  l’aveu  du  meurtre,  comment  persuadera-t-il  de  son
         innocence la nombreuse assemblée qui l’écoute ? Cependant, si votre
         humanité accorde un moment d’attention à ma défense, je démontrerai
         facilement que ce n’est point un crime volontaire qui me fait courir
         aujourd’hui  le  risque  d’une  condamnation  capitale ;  mais  que  le
         résultat bien fortuit d’un mouvement d’indignation légitime est le seul
         fondement de l’odieuse prévention qui m’amène devant vous :
            J’avais soupé en ville, et je rentrais assez tard, ayant bu plus que de
         raison ; je n’hésite pas à en convenir. Arrivé devant la maison où je
         loge, celle de l’honorable Milon votre concitoyen, je vois des brigands
         déterminés qui tentaient de s’y introduire, en faisant sauter les gonds
         et en forçant la porte d’entrée. Déjà toute la fermeture, bien que des
         plus solides, avait cédé à leurs efforts, et il n’était plus question pour
         eux que de mettre à mort les habitants.   Le plus désespéré de la bande,
         homme gigantesque, exhortait ainsi ses camarades :   Alerte, enfants !
         tombons vigoureusement sur ces dormeurs. Point de mollesse, point
         de quartier ! vite, l’épée au poing, promenons partout le carnage dans
         cette maison.   Tuez dans leur lit ceux qui dorment, assommez ceux
         qui résisteront ; que personne n’échappe, si nous voulons en échapper
         nous-mêmes.   Je l’avouerai, citoyens, en présence de tels forcenés je
         ne vis que mon devoir d’honnête homme, que l’extrême danger qui
         menaçait la famille de mon hôte, que mon propre péril.   Je tire une
         petite épée que je porte avec moi pour ces sortes de rencontres, et je
         fonds sur les brigands, espérant que cette démonstration les mettrait en
         fuite ;   mais j’avais affaire à des sauvages, à des bêtes féroces. Au lieu
         de fuir en me voyant armé, ils se tournent résolument contre moi.
            Un véritable combat s’engage. L’un d’eux, le chef et l’orateur de la
         troupe, s’élance, et, de ses deux mains m’empoignant aux cheveux, me
         fait renverser la tête en arrière.   Il va me l’écraser avec un pavé qu’il
         demande à grands cris, lorsque je le frappe moi-même d’une main
         sûre, et le jette à mes pieds. Le second s’était attaché à mes jambes, et
         me les mordait avec rage ; je prends mon temps, et lui plonge mon



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