Page 69 - L'ane d'Or - auteur : APULEE- Libre de droit
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forme le souhait, et déjà l’humide cour l’environne, comme si elle l’eût
         d’avance convoquée pour lui rendre hommage.   Ce sont les filles de
         Nérée chantant en chœur, c’est Portune à la barbe verte et hérissée,
         c’est Salacia portant sa charge de poissons qui se débattent contre son
         sein, et le petit dieu Palémon chevauchant son dauphin docile. Des
         troupes de Tritons bondissent de tous côtés sur les ondes.   Celui-ci,
         soufflant  dans  une  conque  sonore,  en  tire  les  sons  les  plus
         harmonieux ; celui-là oppose un tissu de soie à l’ardeur du soleil. Un
         autre tient un miroir à portée des yeux de sa souveraine. D’autres se
         glissent en nageant sous son char, que traînent deux coursiers, et de
         leur dos le soulèvent à la surface. C’est avec ce cortège que Vénus
         allait rendre visite au vieil Océan.
            Psyché  cependant  n’en  était  pas  plus  avancée  avec  sa  beauté
         merveilleuse. Personne qui n’en soit frappé, personne qui ne la vante ;
         mais personne aussi, roi, prince ou particulier, qui se présente comme
         époux.   On admire ses formes divines comme  on admire le chef-
         d’œuvre d’art statuaire.   Ses deux sœurs, beautés nullement insolites,
         et  qui  n’avaient  point  fatigué  la  renommée,  trouvent  des  rois  pour
         partis,  font  toutes  deux  de  brillants  mariages.      Psyché  reste  non
         pourvue dans la maison paternelle, pleurant la solitude où on la laisse :
         sa  santé  en  souffre,  son  humeur  s’en  aigrit ;  idole  de  l’univers,  sa
         beauté lui devient odieuse.
              Si la fille est infortunée, le père est au désespoir. Il soupçonne
         quelque rancune d’en haut ; et, craignant sur toute chose le courroux
         des dieux, il va consulter l’oracle antique du temple de Milet.   Un
         hymen, un mari, c’est tout ce qu’il demande pour la vierge délaissée.
         Apollon, bien que Grec, et Grec d’lonie, du fait de celui qui fonda son
         culte à Milet, rend, en bon latin, la réponse que voici :
            : Qu’en ses plus beaux atours la vierge abandonné
            : Attende sur un roc un funèbre hyménée.
            : Son époux d’un mortel n’a pas reçu le jour :
            : Il a la cruauté, les ailes du vautour ;
            :  Il déchire les cœurs, et tout ce qui respire
            : Subit, en gémissant, son tyrannique empire.
            : Les dieux, dans leur Olympe, ont tous porté ses fers,
            : Et le Styx contre lui défend mal les enfers.



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