Page 74 - L'ane d'Or - auteur : APULEE- Libre de droit
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leurs vieux parents. La nuit même de leur arrivée, l’époux eut avec
Psyché la conversation suivante : Ma Psyché, ma compagne adorée,
la cruelle Fortune te prépare la plus périlleuse des épreuves. Ta
prudence, crois-moi, ne saurait être trop éveillée. On te croit morte,
et tes deux sœurs, affligées de ta perte, sont déjà sur ta trace. Elles vont
venir au pied de ce rocher. Si leurs lamentations arrivent jusqu’à ton
oreille, garde-toi de leur répondre, de leur donner même un coup d’œil.
Sinon, il en résultera pour moi les plus grands chagrins, pour toi les
plus grands malheurs. Psyché parut se résigner, et promit obéissance.
Mais l’époux n’eut pas plutôt disparu avec les ténèbres, qu’elle se
lamente, et toute la journée se passe en pleurs et en gémissements.
C’est maintenant qu’elle est perdue, puisque ces beaux lieux ne sont
qu’une prison pour elle, puisque désormais, sevrée de tout commerce
humain, elle ne peut rassurer ses sœurs désolées, et qu’elle n’a pas
même la consolation de les voir. Elle néglige le bain, ne prend aucune
nourriture, et se refuse à toute distraction. Ses pleurs n’avaient pas
cessé de couler, quand elle se retira pour se mettre au lit.
Son mari est à ses côtés plus tôt que de coutume ; et l’embrassant
tout éplorée : Ma Psyché, dit-il, est-ce là ce que tu m’avais promis ?
Ton époux n’a-t-il rien à attendre, rien à espérer de toi ? Quoi donc !
toujours gémir, et le jour et la nuit, et jusque dans mes bras ? Eh bien !
satisfais ton envie, contente un désir funeste : mais rappelle-toi mes
avis, lorsque viendra (trop tard hélas !) le moment du repentir. Psyché
le presse, Psyché l’implore : il y va, dit-elle, de sa vie. Enfin elle
l’emporte. Elle verra ses sœurs, elle pourra les consoler, s’épancher
avec elles. L’époux accorde tout aux prières de la jeune épouse. Il va
plus loin ; il lui permet de combler à discrétion ses sœurs et d’or et de
bijoux. Mais il lui interdit à plusieurs reprises, et sous les plus
terribles conséquences, de jamais chercher à voir sa figure, au cas où
ses sœurs lui en donneraient le conseil pernicieux. Cette curiosité
sacrilège la précipiterait du faîte du bonheur dans un abîme de
calamités, et la priverait à jamais de ses embrassements.
Psyché remercie son époux, et, dans un transport de joie : Ah ! dit-
elle, plutôt cent fois mourir que de renoncer à cette union charmante !
car je t’aime, qui que tu sois ; oui, je t’aime plus que ma vie. Cupidon
lui-même me paraîtrait moins aimable. Mais, de grâce, encore une
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