Page 75 - L'ane d'Or - auteur : APULEE- Libre de droit
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faveur. Ordonne à ton familier Zéphyr d’amener mes sœurs ici, comme
         il m’y a transportée moi-même.   Elle prodigue en même temps à son
         époux les baisers, les mots tendres ; et l’enlaçant des plus caressantes
         étreintes : Doux ami, disait-elle, cher époux, âme de ma vie…   C’en
         est fait, Vénus sera vengée. L’époux cède, non sans regret ; tout est
         promis, et l’approche du jour le chasse encore des bras de Psyché.
            Les deux sœurs cependant se sont fait indiquer le rocher et la place
         même où Psyché a été abandonnée. Elles y courent aussitôt. Les pleurs
         inondent leurs yeux ; elles se frappent la poitrine, et l’écho renvoie au
         loin  leurs  lamentations.      Elles  appellent  par  son  nom  leur  sœur
         infortunée. Du haut de la montagne, leurs cris déchirants vont retentir
         jusqu’aux  oreilles  de  Psyché  dans  le  fond  de  la  vallée.  Son  cœur
         palpite et se trouble ; elle sort éperdue de son palais. Pourquoi cette
         douleur et ces lamentations, s’écria-t-elle ? La voilà celle que vous
         pleurez ;   cessez de gémir, séchez vos pleurs. Il ne tient qu’à vous
         d’embrasser celle qui  les cause.    Alors elle appelle Zéphyr,  et  lui
         transmet l’ordre de son époux. Aussitôt, serviteur empressé, Zéphyr,
         d’un  souffle  presque  insensible,  enlève  les  deux  sœurs,  et  les
         transporte auprès de Psyché.   On s’embrasse avec transport, mille
         baisers impatients se donnent et se rendent. Aux larmes de la douleur
         succèdent les larmes que fait couler la joie.   Allons, dit-elle, entrons
         dans ma demeure : plus de chagrin ; il faut se réjouir, puisque votre
         Psyché est retrouvée.
            Elle dit, et se plaît à étaler à leurs yeux les splendeurs de son palais
         d’or, à leur faire entendre ce peuple de voix dont elle est obéie. Un
         bain somptueux leur est offert, puis un banquet qui passe en délices
         tout ce dont l’humaine sensualité peut se faire idée.   Si bien que, tout
         en  savourant  à  longs  traits  l’enivrement  de  cette  hospitalité
         surnaturelle, les deux sœurs commencent à sentir la jalousie qui germe
         au fond de leurs jeunes cœurs.   L’une d’elles à la fin presse Psyché, et
         ne tarit pas de questions sur le possesseur de tant de merveilles. Qui
         est ton mari ? comment est-il fait ?   Fidèle à l’injonction conjugale,
         celle-ci se garde bien de manquer au secret promis. Une fiction la tire
         d’affaire. Son mari est un beau jeune homme, dont le menton se voile
         d’un  duvet  encore  doux  au  toucher.  La  chasse  est  son  occupation
         habituelle ; il est toujours par monts et par vaux.   Et, pour couper court



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