Page 29 - Les Mile et une nuits - conte orientale libre de droit, par DZWEBDATA.COM
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pouvez juger par le motif qui m’oblige
à vous la demander. J’ai dessein
d’arrêter le cours de cette barbarie
que le sultan exerce sur les familles
de cette ville. Je veux dissiper la
juste crainte que tant de mères ont de
perdre leurs filles d’une manière si
funeste. - Votre intention est fort
louable, ma fille, dit le vizir ; mais
le mal auquel vous voulez remédier me
paraît sans remède. Comment prétendez-
vous en venir à bout ?
- Mon père, repartit Scheherazade,
puisque par votre entremise le sultan
célèbre chaque jour un nouveau mariage,
je vous conjure, par la tendre
affection que vous avez pour moi, de me
procurer l’honneur de sa couche. » Le
vizir ne put entendre ce discours sans
horreur : « Ô Dieu ! interrompit-il
avec transport. Avez-vous perdu
l’esprit, ma fille ? Pouvez-vous me
faire une prière si dangereuse ? Vous
savez que le sultan a fait serment sur
son âme de ne coucher qu’une seule nuit
avec la même femme et de lui faire ôter
la vie le lendemain, et vous voulez que
je lui propose de vous épouser ?
Songez-vous bien à quoi vous expose
votre zèle indiscret ? - Oui, mon père,
répondit cette vertueuse fille, je
connais le danger que je court et il
saurait m’épouvanter. Si je péris, ma