Page 32 - Les Mile et une nuits - conte orientale libre de droit, par DZWEBDATA.COM
P. 32

minuit qu’on m’attache à une charrue
              que l’on me fait traîner tout le long
              du jour en fendant la terre ; ce qui me
              fatigue à un point, que les forces me
              manquent quelquefois. D’ailleurs, le
              laboureur, qui est toujours derrière
              moi, ne cesse de me frapper. À force de
              tirer la charrue, j’ai le cou tout
              écorché. Enfin, après avoir travaillé
              depuis le matin jusqu’au soir, quand je
              suis de retour, on me donne à manger de
              méchantes fèves sèches, dont on ne
              s’est pas mis en peine d’ôter la terre,
              ou d’autres choses qui ne valent pas
              mieux. Pour comble de misère, lorsque
              je me suis repu d’un mets si peu
              appétissant, je suis obligé de passer
              la nuit couché dans mon ordure. Tu vois
              donc que j’ai raison d’envier ton sort.
              »
              « L’âne n’interrompit pas le bœuf ; il
              lui laissa dire tout ce qu’il voulut ;
              mais quand il eut achevé de parler : «
              Vous ne démentez pas, lui dit-il, le
              nom d’idiot qu’on vous a donné ; vous
              êtes trop simple, vous vous laissez
              mener comme l’on veut, et vous ne
              pouvez prendre une bonne résolution.
              Cependant quel avantage vous revient-il
              de toutes les indignités que vous
              souffrez ? Vous vous tuez vous-même
              pour le repos, le plaisir et le profit
              de ceux qui ne vous en savent point de
   27   28   29   30   31   32   33   34   35   36   37