Page 62 - Les Mile et une nuits - conte orientale libre de droit, par DZWEBDATA.COM
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m’aperçus qu’il coulait de ses yeux des
              ruisseaux de larmes. Cela me parut
              assez extraordinaire ; et  me sentant,
              malgré moi, saisi d’un mouvement de
              pitié, je ne pus me résoudre à la
              frapper. J’ordonnai à mon fermier de
              m’en aller prendre une autre.
               Ma femme, qui était présente, frémit
              de ma compassion ; et s’opposant à un
              ordre qui rendait sa malice inutile : «
              Que faites-vous, mon ami ? s’écria-t-
              elle. Immolez cette vache. Votre
              fermier n’en a pas de plus belle, ni
              qui soit plus propre à l’usage que nous
              en voulons faire. » Par complaisance
              pour ma femme, je m’approchai de la
              vache ; et combattant la pitié qui en
              suspendait le sacrifice, j’allais
              porter le coup mortel, quand la
              victime, redoublant ses pleurs et ses
              beuglements, me désarma une seconde
              fois. Alors je mis le maillet entre les
              mains du fermier, en lui disant : «
              Prenez, et sacrifiez-la vous-même ; ses
              beuglements et ses larmes me fendent le
              cœur. » « Le fermier, moins pitoyable
              que moi, la sacrifia. Mais en
              l’écorchant, il se trouva qu’elle
              n’avait que les os, quoiqu’elle nous
              eût paru très-grasse. J’en eus un
              véritable chagrin : « Prenez-la pour
              vous, dis-je au fermier, je vous
              l’abandonne ; faites-
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