Page 73 - Les Mile et une nuits - conte orientale libre de droit, par DZWEBDATA.COM
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voyage, et d’aller trafiquer avec eux.
Je rejetai d’abord leur proposition ; «
Vous avez voyagé, leur dis-je, qu’y
avez-vous gagné ? Qui m’assurera que je
serai plus heureux que vous ? » En vain
ils me représentèrent là-dessus tout ce
qui leur sembla devoir m’éblouir et
m’encourager à tenter la fortune ; je
refusai d’entrer dans leur dessein.
Mais ils revinrent tant de fois à la
charge, qu’après avoir pendant cinq ans
résisté constamment à leurs
sollicitations, je m’y rendis enfin.
Mais quand il fallut faire les
préparatifs du voyage, et qu’il fut
question d’acheter les marchandises
dont nous avions besoin, il se trouva
qu’ils avaient tout mangé, et qu’il ne
leur restait rien des mille sequins que
je leur avais donnés à chacun. Je ne
leur en fis pas le moindre reproche ;
au contraire, comme mon fonds était de
six mille sequins, j’en partageai la
moitié avec eux, en leur disant : « Mes
frères, il faut risquer ces trois mille
sequins, et cacher les autres en
quelque endroit sûr, afin que si notre
voyage n’est pas plus heureux que ceux
que vous avez déjà faits, nous ayons de
quoi nous en consoler, et reprendre
notre ancienne profession. » Je donnai
donc mille sequins à chacun, j’en
gardai autant pour moi, et j’enterrai