Page 30 - GUERRE DE JUGHURTA par SALLUSTE - Traduction Ch. Durozoir - 1865 - DZWEBDATA
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gagner de nuit le prochain rivage à travers les
retranchement ennemis, et à se rendre ensuite à Rome.
XXIV. En peu de jours les Numides accomplissent leur
mission, la lettre d'Adherbal fut lue au sénat. En voici le
contenu :
«Ce n'est pas ma faute, sénateurs, si j'envoie souvent vous
implorer ; mais les violences de Jugurtha m'y contraignent :
il est si acharné à ma ruine, qu'il méprise la colère des
dieux et la vôtre, et qu'il préfère mon sang à tout le reste.
Depuis cinq mois je suis assiégé par ses troupes, moi, l'ami
et l'allié du peuple romain ! Ni les bienfaits de Micipsa
mon père, ni vos décrets, ne me protègent contre sa fureur.
Pressé par ses armes et par la famine, je ne sais ce que je
dois le plus appréhender. Ma situation déplorable
m'empêche de vous en écrire davantage au sujet de
Jugurtha. Aussi bien ai-je déjà éprouvé qu'on a peu de foi
aux paroles des malheureux. Seulement, je n'ai pas de
peine à comprendre qu'il porte ses prétentions au-delà de
ma perte ; car il ne peut espérer d'avoir à la fois ma
couronne et votre amitié : laquelle des deux lui tient le plus
au coeur ? C'est ce qu'il ne laisse douteux pour personne. Il
a commencé par assassiner mon frère Hiempsal ; il m'a
chassé ensuite du royaume de mes pères. Sans doute, nos
injures personnelles peuvent vous être indifférentes : mais
c'est votre royaume que ses armes ont envahi ; c'est le chef
que vous avez donné aux Numides qu'il tient assiégé.
Quant aux paroles de vos ambassadeurs, mes périls font
assez connaître le cas qu'il peut en faire. Quel moyen reste-
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