Page 38 - GUERRE DE JUGHURTA par SALLUSTE - Traduction Ch. Durozoir - 1865 - DZWEBDATA
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Gracchus et de Marcus Fulvius, combien de gens de votre
ordre n'a-t-on pas fait mourir en prison ! A l'une et à l'autre
époque, ce ne fut pas la loi, mais leur caprice seul qui mit
fin aux massacres. Au surplus, j'y consens : rendre au
peuple ses droits, c'est aspirer à la royauté, et je tiens pour
légitime tout ce qui ne pourrait être vengé sans faire couler
le sang des citoyens. Dans ces dernières années, vous
gémissiez en secret de la dilapidation du trésor public, et de
voir les rois et des peuples libres, tributaires de quelques
nobles, de ceux-là qui seuls sont en possession de l'éclat
des hautes dignités et des grandes richesses. Cependant
c'était trop peu pour eux de pouvoir impunément
commettre de tels attentats. Ils ont fini par livrer aux
ennemis de l'Etat vos lois, la dignité de votre empire, et
tout ce qu'il y a de sacré aux yeux des dieuxs et des
hommes. Après ces nouveaux crimes, éprouvent-ils
quelque honte, quelque repentir ? Ils se montrent
insolemment à vos regards tout brillants de magnificence,
faisant parade, les uns de leurs consulats et de leurs
sacerdoces, les autres de leurs triomphes, comme s'ils
avaient lieu de s'honorer de ces distinctions usurpées. Des
esclaves achetés à prix d'argent n'endurent point les
mauvais traitements de leurs maîtres, et vous, Romains, nés
pour commander, vous supportez patiemment l'esclavage !
Mais que sont-ils donc, ceux qui ont envahi la république ?
Des scélérats couverts de sang, dévorés d'une monstrueuse
cupidité ; les plus criminels et en même temps les plus
orgueilleux de tous les hommes. Pour eux, la bonne foi,
l'honneur, la religion, la vertu, sont, tout comme le vice,
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