Page 46 - GUERRE DE JUGHURTA par SALLUSTE - Traduction Ch. Durozoir - 1865 - DZWEBDATA
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se joue du consul par ses continuels ajournements de la
guerre et de la paix. Quelques-uns soupçonnèrent alors
Albinus d'avoir été d'intelligence avec le roi, ils attribuaient
à une collusion frauduleuse, et non à la lâcheté, le
ralentissement si prompt d'une guerre si activement
commencée. Le temps s'étant ainsi écoulé, on touchait au
jour des comices alors Albinus laissa l'armée sous la
conduite de son frère, le propréteur Aulus, et partit pour
Rome.
XXXVII. La république était alors cruellement agitée par
les dissensions des tribuns du peuple. P. Lucullus et L.
Annius prétendaient, malgré l'opposition de leurs
collègues, se faire continuer dans leur magistrature : cette
querelle, qui dura toute l'année, empêchait la tenue des
comices. Pendant ces retards, Aulus, qui, comme nous
l'avons dit, était resté au camp avec le titre de propréteur,
conçut l'espoir, ou de terminer la guerre, ou d'extorquer de
l'argent au roi numide par la terreur des armes romaines.
Au mois de janvier, il fait sortir ses troupes de leurs
quartiers, à marches forcées, par un temps fort rude, et
s'approche de Suthul, où étaient les trésors de Jugurtha.
Cette place, grâce à la rigueur de la saison et à l'avantage
de sa position, ne pouvait être prise ni même assiégée,
autour de ses murailles, bâties sur le bord d'un roc escarpé,
s'étendait une plaine fangeuse, que les pluies de l'hiver
avaient changée en marais. Cependant, soit pour intimider
le roi par une attaque simulée, soit qu'il fût aveuglé par
l'espoir de soumettre une ville remplie de trésors, Aulus
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