Page 117 - Histoires et Contes Arabes - Bibliothèque du bon vivant - 1927 - DZWEBDATA
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HISTOIRES ARABES
sion d'être revenu de tout, de n'être plus dupe de
rien.
Un jour qu'il était en voyage, il lui arriva de
demander l'hospitalité à un Arabe. Le maître de la
tente était absent ; ce fut sa femme qui reçut notre
philosophe. Pendant qu'elle préparait le repas, il
restait absorbé dans la lecture de .son fameux livre,
qu'il portait toujours avec lui.
— Que lis-tu là ;' dit la femme.
— Un livre que j'ai écrit sur toutes les ruses des
femmes.
— Toutes les ruses ! dit-elle... Es-tu bien sûr qu'elles
y soient toutes ?
— Toutes, absolument î Et ce n'est pas à moi qu'on
pourrait en remontrer.
Agacée de cette présomption, la femme résolut de
lui jouer un tour. Elle se mit à lui lancer des oeillades
si incendiaires que le philosophe, malgré son âge et
sa philosophie, quitta la lecture de son livre pour se
rapprocher de son hôtesse.
Il commençait déjà à la lutiner quand le mari
rentra. En entendant le pas de son cheval, la fename
obligea le galant à s'enfermer dans un coffre auquel
elle donna un tour de clef. Et elle prit la clef.
Or, les deux époux avaient joué la veille au jeu
de l'iadesté, qui correspond un peu à notre « philip-
pine » : on ne doit recevoir aucun objet de la per-
sonne avec qui l'on joue sans prononcer le mot
iadesté. Le perdant paie un gage.
Le mari entra donc et se mit à table. Pendant le
repas, sa femme se mit à lui raconter qu'un homme
était venu en son absence, lui avait fait la cour et
que son mari était revenu fort à propos pour soutenir
sa vertu chancelante.
— Que me dis-tu là ? s'écria le mari. C'est ainsi
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