Page 195 - Histoires et Contes Arabes - Bibliothèque du bon vivant - 1927 - DZWEBDATA
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HISTOIRES ARABES
Un pauvre homme avait une jarre de miel.
— Je m'en vais la vendre au marché, se disait-il.
Avec le prix, j'achèterai une chèvre que je reven-
drai avec bénéfice pour acheter un bœuf. Quand celui-
ci sera bien gras, j'en tirerai bien le prix d'un champ.
J'épouserai une femme riche. J'aurai un fils. J'élè-
verai bien celui-ci. S'il n'est pas sage, je le corri-
gerai...
Ce disant, il fit un geste du bras et renversa son
pot de miel...
Un djibli vendait des oranges à Fès, dans le quar-
tier de Moulay-Idriss. Assis contre un mur, il avait
une tunique courte et point de pantalon, si bien
qu'une passante remarqua, par hasard, sa remarqua-
ble virilité.
Emerveillée, elle lui demanda le prix des oranges,
lui acheta toute sa marchandise et le pria de les por-
ter chez elle.
Cette femme était une riche veuve qui était exi-
geante, car elle avait refusé déjà plusieurs préten-
dants. Le djibli lui plut tant qu'elle l'épousa sur-le-
champ, et notre homme, devenu grand commerçant,
connut la fortune et ses douceurs.
Un de ses frères cadets était resté dans son village
de la montagne. Il vint un jour à Fès et apprit de
quelle façon son aîné s'était enrichi. Lui aussi il
voulut faire fortune avec son zeb, acheta un panier
d'oranges et alla les vendre près de Moulay-Idriss en
retroussant très haut sa tunique devant toutes les
femmes qui passaient.
Le mohtasseb, l'ayant vu dans cette position im-
pudique, le fit appréhender, et notre homme reçut
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