Page 27 - Histoires et Contes Arabes - Bibliothèque du bon vivant - 1927 - DZWEBDATA
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HISTOIRES ARABES
Nasr eddin Khodja allait au hammam et ne donnait
chaque fois qu'un très chiche pourboire. Aussi les
garçons de bain et les masseurs ne s'occupaient-ils
pas beaucoup de lui.
Une fois, en s'en allant, il leur laissa une assez
grosse somme.
Les gens étaient confus, car ils ne l'avaient pas
mieux traité qu'à l'ordinaire*
Quand il revint, tous s'empressèrent autour de lui,
avec force salamalecs, et se disputaient l'honneur de
le servir. C'était à qui lui apporterait les baquets, l'eau
tiède et l'eau chaude, le savon, les serviettes, à qui
le masserait dans tous les sens et toutes les positions,
à qui le recou^Tirait d'une mousse onctueuse et l'asper-
gerait ensuite, puis l'envelopperait de linge sec.
Mais cette fois, quand il partit, il ne donna rien.
Telle était son humeur.
Un poète turc, de caractère fantaisiste, avait un
chien qu'il aimait beaucoup.
L'animal mourut. Son maître l'enterra dans son
jardin et réunit le soir quelques amis à dîner. Pendant
le repas on parla du chien défunt et l'on improvisa
quelques poèmes gracieux pour vanter ses vertus.
Quelqu'un dénonça le poète, l'accusant d'avoir com-
mis un sacrilège et enterré rituellement son chien
comme un homme.
— As^tu fait des prières sur la tombe de cette bête ?
demanda le cadi après l'avoir convoqué à son tribu-
nal.
— Non pas, seigneur cadi, déclara le poète. Mais
mon chien a fait un testament, et sur ce testament
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