Page 57 - Histoires et Contes Arabes - Bibliothèque du bon vivant - 1927 - DZWEBDATA
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HISTOIRES ARABES
conjugaux, à la grande satisfaction de sa nouvelle
épouse, qui pourtant soupira :
— Je te croyais mieux pourvu !
— Qu'à cela ne tienne, dit-il alors. Ne t'inquiète
pas. J'en ai un autre de rechange.
— Quelle chance ! fît la femme. Mets-le tout de
suite celui-là, et voyons ce que tu peux faire avec.
Il redoubla. Mais l'insatiable épouse s'écria :
— Je t'en prie, mets les deux ensemble.
Marouf se rendit au marché, un jour, et acheta
un estomac de mouton.
— Combien l'as-tu payé ? lui demanda quelqu'un.
Il dit le prix.
Plusieurs personnes, par hasard, lui firent la même
question.
A la fin, il se mit en colère et jeta l'estomac à la
figure du questionneur.
Celui-ci le traîna au tribunal du pacha et demanda
réparation pour l'outrage.
— Comment les choses se sont-elles passées ? de-
manda le pacha.
— Prie sur le Prophète, dit alors Marouf.
Or, quand on dit à quelqu'un : « Prie sur le
Prophète )), la personne, fût-ce le Sultan lui-même,
est tenue de dire : a Qu'Allah bénisse le Prophète et
les siens ! » On use de ce procédé quand quelqu'un
se met en colère pour l'obliger à prendre le temps
de la réflexion, et cela coupe souvent son emporte-
ment.
— Qu'Allah bénisse le Prophète et sa famille ! dut
donc prononcer lé pact#a, qui voulut aussitôt repren-
dre l'interroDfatoire.
Mais Marouf ne le tint pas quitte.
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